• Passion de Brian De Palma

     

    Christine (Rachel McAdams), dirigeante dominatrice de la filière américaine d'une multinationale, entretient une relation ambiguë avec son assistante Isabelle (Noomi Rapace), une femme mystérieuse.

    Quand Saïd Ben Saïd, le producteur franco-tunisien, rencontre l'agent de Brian De Palma en 2010, il lui propose les droits de remake de Crime d'amour, le dernier film d'Alain Corneau. Un jour plus tard, le réalisateur accepte. Résultat : un suspense publicitaire autour du nouveau film du grand cinéaste, un titre qui fait monter la pression : Passion et une bande-annonce alléchante. Résultat : après nous avoir laissé trépigner dans un sauna pendant des mois, le réalisateur nous à envoyer rouler dans la neige par un grand coup de pied aux fesses.

    Si Crime d'amour manquait parfois de sel, Passion est un plat surgelé mal réchauffé. Dès les premières minutes, il semble être un copié-collé de l'original tant les dialogues et les plans sont similaires. Quand enfin De Palma décide de prendre les choses en mains par des décadrages et des split-screen, on se dit que l'attente en valait peut-être la peine... hélas, la sauce ne prend pas. La tension sexuelle entre les deux personnages féminins n'existe que dans la bande-annonce du film (et dans l'esprit des spectateurs les plus imaginatifs). La faute à la direction d'acteurs ou au casting ? Rachel McAdams et Noomi Rapace jouent les lesbiennes huppées avec un jeu américano-hétérosexuel plus qu'énervant. D'ailleurs, confier le rôle tenu par Kristin Scott Thomas chez Corneau à Rachel McAdams était déjà une blague de mauvais goût. Quand on sait que le directeur de la photographie José Luis Alcaine, « l'illuminateur » des femmes de Pedro Almodovar, a ici mis son talent au service de Brian De Palma, on ne peut s'empêcher de se dire que c'est donner de la confiture au cochon.

    Annoncer comme le chef d'oeuvre de ce début d'année, ce film manque de tout. D'ambiguité, de suspense, d'originalité... Passion est comme Crime d'amour, la classe française en moins. Décidément, certaines épices ne supportent pas la chaleur.


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    En 1915, Auguste Renoir (Michel Bouquet) est à Cagnes-sur-mer où il passe les dernières années de sa vie dans son domaine des Colettes. Perclus de rhumatismes déformants, il peint malgré la maladie, au milieu d'un groupe de bonnes et de cuisinières aux petits soins. C'est à cette époque qu'il rencontre son dernier modèle, Andrée Hessling (Christa Theret), surnommée Dédée. Blessé de guerre, son fils Jean (Vincent Rottiers) vient passer sa convalescence dans le domaine de son père.

    Dans un décor lumineux à la végétation luxuriante, Gilles Bourdos met en scène les derniers jours du peintre avec délicatesse. Une lumière rasante de fin d'été coule dans un champs d'oliviers. Un vieil homme, courbé, pose des touches légères sur une toile. Devant lui, une femme nue, le bassin recouvert d'un drap blanc, offre son corps doré au regard du peintre. Il y a là tout ce qui a fait la signature de Renoir : la lumière, la couleur, la chair. Cette chair dont il n'a pu se passer même dans ses dernières années, allant jusqu'à s'entourer d'un harem. Ses femmes sont ses domestiques. Mais elles ont pris le rôle de mère, de sœur, parfois d'amante. Elles évoluent autour du peintre dans une joie gracieuse, allégeant les scènes où elles soignent ses mains, abîmées par la maladie.

    C'est aussi l'histoire d'une double rencontre. Celle d'Auguste et de son ultime modèle, et surtout, celle de Jean et de sa première actrice. Lui, sans ambition, transparent comme l'eau dans le verre où son père trempe son pinceau. Elle, ambitieuse, flamboyante comme la peinture orange qui colore l'eau par un simple contact. Cette femme est le lien entre deux générations, témoin d'un talent qui s'éteint et inspiratrice d'une vocation artistique. Grâce à elle, Jean apprend à regarder à travers le travail de son père. Et c'est soudain le flou qui nous fait passer d'une toile à la vision du peintre. Les personnes deviennent des silhouettes de couleurs vives s'épanouissant dans un arrière-plan foisonnant de verdure. Les formes vibrent, incertaines et pourtant entières, vivantes. Nous sommes dans un tableau de Renoir.

     


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  • Tourné en format anglais (une saison équivaut à huit épisodes d'une heure), The Paradise nous plonge dans l'univers élégant et spectaculaire des premiers grands magasins du dix-neuvième siècle.

    The Paradise de Bill Gallagher

    En 1870, après la mort de son père, Denise Lovett (Joanna Vanderham) se rend dans le nord de l'Angleterre pour retrouver son oncle, Edmund (Peter Wight). Tailleur de profession, il dirige une échoppe dans une rue commerçante. Mais les affaires ne marchent pas bien pour les petites boutiques. La faute au premier grand magasin qui menace de s'accaparer la rue entière, The Paradise. Son créateur, John Moray (Emun Elliot), ne semble reculer devant rien pour obtenir ce qu'il désire. Edmund ne pouvant procurer un travail à sa nièce, Denise propose ses services au Paradis.

    Bill Gallagher a transposé le récit du célèbre roman d'Emile Zola, Au Bonheur des Dames, en Angleterre. Si le postulat de départ est respecté, le créateur s'est amusé à suivre d'autres voies pour alimenter le récit. Des modifications bienvenues, appuyées par une reconstitution détaillée des costumes et des décors. Les personnages secondaires n'ont pas été délaissés, ils sont tour à tour attachants et complexes. La lumière cotonneuse de l'image s’accommode parfaitement avec les intrigues qui se tissent dans ce grand magasin. Le seul défaut que je peux reprocher à cette série est d'être trop accès sur le public féminin. Les romances sont privilégiées par rapport aux autres histoires comme les luttes de pouvoir ou les problèmes financiers.

    Une deuxième saison a déjà été commandée par la BBC.


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  • Du Vent dans mes mollets de Carine Tardieu

    Rachel (Juliette Gombert) est une petite fille discrète, coincée entre une mère possessive, un père déresponsabilisé et une grand-mère mutique. Voyant sa fille dormir avec son sac de classe lors de l'approche de la rentrée, Colette (Agnès Jaoui) décide de l'amener chez une psychologue. Rachel sort peu à peu de sa coquille, aidée par le docteur Trebla (Isabella Rossellini) et sa camarade de classe Valérie (Anna Lemarchand), intrépide casse-cou.

    Adapté du roman éponyme de Raphaële Moussafir, Du Vent dans mes mollets suit la veine tracée par le précédent film de la réalisatrice : La Tête de Maman. Après l'adolescence, c'est l'enfance que Carine Tardieu décide d'explorer avec un regard à la fois tendre et réaliste. La gravité des sujets abordés (la mort, l'amitié, l'éducation parentale et scolaire, le couple...) est allégé par l'humour. La rencontre ne se fait pas seulement pour les petites filles, c'est aussi celle des parents. Poussés par l'amitié entre leur enfant, Colette et Michel (Denis Podalydès), couple monotone, côtoie Catherine (Isabelle Carré), mère célibataire fantasque. La confrontation de ces deux univers réveille les consciences et les rêves enfouis. Les parents apprendront finalement autant que leur progéniture. Du Vent dans mes mollets est une évocation sensible de l'enfance et une initiation à l'amitié.


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  • Blanche-Neige et le chasseur de Rupert Sanders

    Une relecture intéressante du conte des frères Grimm qui marque les débuts au cinéma du jeune réalisateur Rupert Sanders.

    Depuis l'assassinat de son père le roi, Blanche-Neige (Kristen Stewart) est retenue captive par Ravenna, sa belle-mère (Charlize Theron). Obsédée par la jeunesse éternelle, la reine est persuadée que manger le cœur de sa belle-fille est la seule manière de devenir immortelle. Lorsqu'on vient la chercher, Blanche-Neige réussit à s'enfuir dans la forêt. Mais Ravenna charge Eric (Chris Hemsworth), un chasseur expérimenté, de la poursuivre.

    Cette nouvelle version du conte a évacué les clichés de la fragile héroïne et de la méchante sans histoire. Mais il n'a pas évité la position de second rôle pour Chris Hemsworth qui fait presque figurant à côté de ses partenaires féminins. La grande trouvaille des scénaristes réside ici dans l'approfondissement bienvenu du personnage de la marâtre. Ce personnage a (enfin) été doté d'une dimension psychologie. Abimée par les hommes, Ravenna est une blonde glaciale déterminée à se venger, imposant aux autres ce qu'elle a subit durant son enfance. Grâce à son interprétation magistrale, Charlize Theron donne corps et âme à son personnage et surpasse Kristen Stewart dont le jeu se révèle bien mince à côté de sa camarade. On excusera également les raccourcis scénaristiques (j'ai besoin d'un cheval... oh, un cheval!) pour admirer l'interprétation royale de Charlize Theron et s'émerveiller des effets spéciaux rappelant Le Seigneur des Anneaux.


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