• Les Privilèges de Jonathan Dee

    La vie de Cynthia et Adam est toute tracée: un mariage, deux enfants, une situation financière plus que confortable. Rien ne semble leur résister...

     

    Jonathan Dee signe une oeuvre lente et cruelle, comme le sont certaines morts. L'absence de rythme et le grand nombre de personnages secondaires à la vacuité troublante déroutent dès les premières pages. On comprend alors que le manque sera un thème récurrent dans ce roman.

    Tout commence par l'amour exclusif qui unit Cynthia et Adam. Un sentiment si puissant qu'il exclu les enfants de l'univers créé par les parents. Un monde où perdre des millions en bourse n'a aucune conséquence, où la culpabilité d'être riche s'étouffe en courant les cocktails des associations humanitaires.

    À l'adolescence, April et Jonas refusent d'entrer dans leur jeu. Le fils entame des études d'Art et prend le contre-pied du mode de vie princier de ses géniteurs. Il pense trouver dans cette vie de bohème un refuge salvateur. Tandis que sa soeur choisit l'autodestruction, grâce à l'argent de ses parents: drogue, alcool, fréquentations douteuses... Deux manières de se révolter face à l'univers parfait des parents qui maîtrisent chaque incident d'une main de maître. Ils sont pourtant incapables d'admettre leur unique échec: l'éducation de leurs enfants.

    Élevés dans une famille où le principe de survie est de faire mieux que son prédécesseur, April et Jonas vont grandir avec l'objectif de l'emporter sur leurs géniteurs. Mais comment dépasser des parents qui ont tout?


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  • D'acier de Silivia Avallone

    Anna et Francesca ont treize ans et le monde entre leurs mains. Malgré leur vie de famille difficile -l'une a un père démissionnaire, la seconde apprécierait qu'il soit un peu moins présent...-, rien ne semble leurs résister. Les garçons les convoitent, les filles les jalousent. Elles règnent sur Stalingrado, un quartier italien d'ouvriers métallurgiques, en face de la Méditerranée.

     

    D'acier est un roman violent, charnel, à la manière du soleil, personnage à part entière qui cognent et consume les protagonistes, à la mesure de l'amitié d'Anna et Francesca. Une amitié si passionnelle qu'on sent venir la chute, le moment terrible mais inévitable où les meilleures amies deviennent des ennemis. Ce genre de relation qui marque à vie, comme une tige d'acier rougit par le feu. L'acier, rôle principal, qui nourrit et détruit aveuglément ceux qui le font.

    Silvia Avallone nous plonge dans un discours libre où chaque personnage à ses propres mots. La construction du texte peut choquer à première vue et donner l'impression d'un roman décousu. Mais l'interruption irrégulière et fréquente du fil narratif reflète le morcellement intérieur des protagonistes. On se laisse immerger dans les descriptions vives et tranchantes. Le regard sans concession de Silvia Avallone nourrit une réflexion sur un symptôme de notre société: la réussite à tout prix. Anna veut devenir médecin ou avocate et Francesca souhaite passer à la télévision. Un même rêve mais deux buts différents. La première héroïne cherche la reconnaissance de son quartier alors que la seconde veut le fuir. Une quête de gloire pour laquelle elles devront sacrifier leur enfance.

    D'Acier est un premier roman réussit que l'auteur nous a livré brut comme un diamant. Une adaptation cinématographique est déjà en cours en Italie, pays natal de l'auteur.


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  • Actualité Littérature

    À l'heure où l'on prône la parité comme une valeur essentielle à la démocratie, où le jour de la femme fait l'objet d'un abattage médiatique; qu'en est-il réellement de la place de l'homme, celui du quotidien? Tonino Benacquista s'est intéressé aux fragilités des mâles ordinaires.

    L'auteur met en scène trois blessés de la vie: Philippe Saint-Jean, intellectuel abandonné par la femme qu'il aime; Yves Lehaleur, trompé par son épouse et Denis Benitez, ancien Don Juan dépressif. Poussés par l'envie de partager leur désespoir, ils assistent au « réunions du jeudi soir », un cercle de parole réservé aux hommes. Ils se rencontrent après une séance, partagent leur vécu, oublient leurs problèmes pour écouter ceux des autres. Au fil des témoignages, ils vont tenter de découvrir ou reconquérir leur identité de mâle. Le lecteur est alors habilement entraîné dans un univers que beaucoup de femmes considèrent comme une légende, la psychologie masculine. Tonino Benacquista brise le stéréotype de l'homme mutique et passif en donnant la parole à la masculinité blessée. C'est sans concession, mais avec une subtilité troublante, qu'il nous décrit le déclin puis la guérison de ces personnages trompés aussi bien par les femmes que par la vie.

    Homo Erectus est un roman qui se lit sur trois plans: celui de l'humanité, celui de l'homme sexué (« erectus » signifie qui se dresse en latin) et enfin celui de l'être humain capable de (re)dresser la tête et de continue à avancer. Car, au final, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes, nous sommes tous à la recherche de ce courage qui nous permet d'agir.


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  • le diable danse à bleeding heart square

    Face à la violence de son mari, Lydia Langstone quitte tout: son époux, son magnifique appartement sur Frogmore Place et son confort quotidien pour trouver refuge chez son père, locataire dans la pension de Bleedinh Heart Square. Un lieu insolite pour une dame de la société qui va devenir indécent lorsque le propriétaire sera accusé de meurtre. Une histoire qui pourrait sembler banale si elle ne se déroulait pas à Londres, en 1934.

    L'originalité ne consiste pas seulement dans la situation -une femme qui rêve de liberté dans une société phallocrate alors que, bientôt, des millions d'êtres humains perdront la leur en même temps que leur vie- elle est aussi présente dans le traitement de l'énigme. J'avoue ne pas être une grande lectrice de thriller. Mais les rares que j'ai lu étaient construit différemment de celui-ci: ils donnaient la part belle aux détectives, policiers ou autres scientifiques et leur rythme était beaucoup plus rapide. Vous ne trouverez trace de ces deux éléments dans le roman d'Andrew Taylor. À Bleeding Heart Square, le mal prend son temps. L'auteur pose d'abord les décors et affine subtilement, au fil des pages, la personnalité trouble de ses personnages, faisant cohabiter bourreaux et victimes dans une pension lugubre qui se révélera peut-être comme le lieu d'un crime.

    Mêlant l'Histoire et l'intrigue, Andrew Taylor signe un thriller d'un genre nouveau et on ne peut que regretter les répétitions et une lourdeur dans la construction des phrases, espérant que ces maladresses sont l'oeuvre du traducteur.


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  • Nous étions les hommes

    Sur la couverture, deux squelettes s'enlacent. Cette photo rappelle étrangement les tombes découvertes après des catastrophes naturelles dans lesquelles deux personnes, ne pouvant supporter d'être séparées, ont attendu la mort ensemble, dans les bras l'une de l'autre.

    Ce n'est pourtant pas d'un phénomène naturel dont il est question dans ce thriller mais environnemental. Alzheimer ne cesse de décimer la population mondiale en touchant des sujets de plus en plus jeunes. Alors que chez les personnes âgées, la maladie provoque la perte de l'identité, chez les adolescents et les adultes, elle s'accompagne d'une violence primitive, déclenchant des massacres aux quatre coins du monde.

    Jenni Cooper, généticienne, et Scott Kinross, docteur dans le plus grand hôpital d'Edimbourg, mettent à jour un indice capable de prévoir le "basculement" des patients atteints d'Alzheimer, c'est-à-dire, le moment précis où ils perdront tout ce qui fait d'eux des êtres humains. Cette découverte va susciter la convoitise d'un des plus grand et dangereux magnat du monde...

    Que penser de ce roman qui met en scène l'un des plus grands fléaux de notre siècle mais qui fini sur un ton résolument optimiste? Je vous avoue que j'ai du mal à trancher: ce roman m'a-t-il plu ou déçu? Il est vrai qu'il amène des questions actuelles concernant la maladie d'Alzheimer. Et c'est peut-être là que le bât blesse. Entre fiction et réalité, Gilles Legardinier pourrait faire perdre son lecteur. Notons tout de même des dialogues d'un sarcasme savoureux qui pimentent ce thriller pour le moins déroutant.

    couverture: Axel Mahé (Supacat)


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